Les archetiers pleurent le pernambouc
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Les archetiers pleurent le pernambouc
LE MONDE | 01.08.07 | 14h40 • Mis à jour le 01.08.07 | 14h40
Empilées au fond de la grange, entre trois vieux vélos et un aspirateur, quelques dizaines de planches n'attirent pas le regard. Deux bâches en plastique, des pièces de sapin pour fixer l'ensemble... Pour un peu, on mêlerait le tout aux bûches de chauffage, entreposées à côté.
Pourtant, Edwin Clément veille sur ce tas de bois comme sur un tas d'or. "C'est avec ça que je vais finir ma vie professionnelle", sourit-il. Dans la bouche d'un quadragénaire, l'expression a de quoi surprendre. Cet artisan consomme peu de sa réserve - il fabrique moins d'une trentaine d'archets par an, qu'il commence ici, dans cette ferme du Morvan, et qu'il achève dans son atelier parisien -, mais le bois de pernambouc vient de voir son commerce sévèrement restreint par la communauté internationale. Or, depuis deux cent cinquante ans, ce bois est la matière première des archets de haute qualité.
Le 13 juin, la Convention sur le commerce des espèces menacées d'extinction (Cites), réunie en session à La Haye, a classé dans son annexe II Caesalpinia echninata. Entre les éléphants du Botswana et certains coraux, les responsables environnementaux de la planète ont porté leur attention sur cette légumineuse de 10 mètres de hauteur. A l'unanimité, ils ont suivi l'appel à l'aide des biologistes de Rio de Janeiro. Dorénavant, toute transaction devra s'accompagner d'un certificat émis par l'exportateur et d'un autre rédigé par le pays importateur. Manière pour les Brésiliens, seuls producteurs, de fermer les vannes.
Pour eux, en effet, cet arbre fétiche est avant tout une "espèce menacée d'extinction", comme ils l'ont officiellement déclaré dès 1992. Leur position ne manque pas, il est vrai, d'arguments. Provenant d'arbres poussant exclusivement dans la forêt pluviale atlantique du Brésil - Mata atlantica -, le bois de pernambouc n'a cessé de voir ses réserves diminuer. "Il rassemble tous les facteurs de l'espèce en danger", souligne Bernard Riera, spécialiste des forêts tropicales au CNRS.
Il ne pousse que sur les sols sablonneux ou argileux arrosés par la pluie. Sa croissance est particulièrement lente, ce qui ralentit la régénérescence de l'espèce. Surtout, "sa zone d'implantation s'est considérablement érodée", insiste Bernard Riera. C'est en effet sur la côte atlantique que s'est bâti le Brésil. Depuis un siècle, la Mata atlantica n'a cessé de céder du terrain, aux cultivateurs et aux éleveurs, comme aux bâtisseurs de villes. Il reste aujourd'hui moins de 10 % de la forêt d'origine.
Les Brésiliens ont pourtant concentré leurs griefs sur "l'exploitation commerciale" du pernambouc. Avec en ligne de mire, les seuls utilisateurs avérés : les fabricants d'archets. Quatre cents petites entreprises réparties aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne, depuis peu au Brésil ou en Chine. Et d'abord en France.
Car si l'Italie constitue le berceau du violon, la France reste la patrie des archets. L'une entretient la statue d'Antonio Stradivarius. L'autre alimente plus discrètement le culte de François-Xavier Tourte (1748-1835), père de l'archèterie moderne. C'est lui qui à la fin du XVIIIe siècle profita des caractéristiques uniques (densité, robustesse, élasticité) du pernambouc pour inventer l'archet moderne.
Cette découverte a non seulement fait passer la musique classique des salons aux grandes salles de concert, elle a également multiplié les possibilités techniques offertes aux violonistes. "Paganini n'aurait jamais eu un tel succès sans le bois de pernambouc", assure Edwin Clément. Façon de dire qu'un grand violon n'est rien sans son archet.
L'ARBRE QUI SAUVERA LA FORÊT
La flambée des prix des instruments à cordes n'a d'ailleurs pas épargné les archets. Pour acquérir une baguette cambrée de 60 grammes sortie des ateliers Tourte, il faut compter un minimum de 120 000 euros. Un archet neuf réalisé par Edwin Clément, coûtera lui de 2 500 à 4 000 euros. "On me dit que c'est cher, grogne l'artisan. Mais demandez à votre plombier de travailler entre 50 et 60 heures et revenez me voir..."
Ce travail de précision, où interviennent aussi la nacre, l'or ou l'argent, l'ébène, la soie, le cuir et le crin, Edwin Clément l'estime lui aussi "menacé d'extinction". De retour de La Haye, où il a assisté impuissant au "désastre", il dresse à son tour un argumentaire serré. Oui, admet-il, le pernambouc est en danger. "Nous sommes les premiers à l'avoir dit, précise-t-il. Et nous sommes les seuls à avoir mis en place un plan de sauvetage."
Depuis 2000, 80 % des archetiers de la planète versent 2 % de leur chiffre d'affaire au programme de conservation du pernambouc (IPCI), dont Edwin Clément est un des porte-parole. 500 000 arbres plantés en cinq ans, un inventaire lancé, des actions de sensibilisation : "L'an dernier, encore, les Brésiliens nous ont demandé d'accroître notre contribution, poursuit l'archetier. Et là, ils nous font passer pour des pilleurs de forêt..."
Edwin Clément respire. Et reprend. "Mais il y a pire. En réalité, ils se moquent du pernambouc. Nous avons juste servi de monnaie d'échange." Explication : avant le sommet de La Haye, le classement de quatre essences était réclamé. Deux espèces de palissandre, le cèdre rouge et le pernambouc. Les pays d'Amérique latine, qui exploitent les trois premières par dizaines de milliers de mètres cubes, se sont liés pour s'opposer à leur classement. En gage de bonne foi, le Brésil a mis en avant sa demande sur le pernambouc et ses quelques centaines de mètres cubes utilisés chaque année. Les trois autres propositions ont été rejetées. "C'est l'arbre qui cache la forêt", soupire Edwin Clément.
"L'arbre qui sauvera la forêt", rétorque Charlotte Nithart, directrice de campagne à l'association Robin des bois. "Ce type d'espèce à forte valeur ajoutée, qui pousse au milieu des autres, peut éviter des coupes massives. Et puis pour une fois que les Brésiliens demandent l'aide de la communauté internationale, il ne faut pas les décourager." Elle estime la décision équilibrée puisque les produits finis ont été exclus, au dernier moment, du dispositif : les instrumentistes en tournée ne devront donc pas demander d'autorisation de circulation pour leur archet. Plus largement, elle juge la mesure protectrice pour les archetiers. "Rien n'interdit, dans vingt ans, quand les arbres plantés seront arrivés à maturité, de faire sortir le pernambouc de l'annexe..."
Une perspective à laquelle Edwin Clément ne croit guère. Dans son atelier de 8 m2, avec vue sur la vallée, il montre sa boîte de petits rabots, son canif, et son petit tour électrique. "A l'époque de Tourte, il y avait des pédales. Mais le reste n'a pas changé." Il présente les grumes, les planches de pernambouc, fait vibrer les baguettes. "Cela fait deux cent cinquante ans que nous cherchons un substitut. Alors ne racontons pas d'histoire : il n'y en a pas. La fibre de carbone, peut-être. Ça deviendra de la chimie, une activité polluante, on devra traiter les déchets..." Il remet la bâche sur son trésor. "La transmission est une part essentielle du métier, ajoute-t-il. Mais aujourd'hui, est-ce que je peux encore prendre un apprenti ? Moi, j'ai assez de bois pour aller jusqu'à la retraite. Pas lui." Il replace ses lunettes et sourit : "Nous ne voulons pas être les derniers dinosaures."
Nathaniel Herzberg
Article paru dans l'édition du 02.08.07
Elastique, résistant et deux fois plus dense que le chêne
LE MONDE | 01.08.07 | 14h40 • Mis à jour le 01.08.07 | 14h40
Depuis cinq siècles, l'histoire du bois du pernambouc semble épouser celle du Brésil. De la colonisation à l'indépendance, elle témoigne tout à la fois des échanges entre l'Europe et l'Amérique, des évolutions techniques et industrielles mais aussi du recul constant des réserves naturelles.
Peu après l'arrivée de Pedro Cabral sur les côtes du Brésil, en 1500, les Portugais découvrent les propriétés tinctoriales de cet arbre. Disponible en quantité dans la forêt altantique qui court sur près de 3 000 km de côte, il est baptisé Pau Brasil - le "bois du Brésil". Une partie de l'Europe le baptise "pernambouc", du nom de cette région du Nordeste où les Portugais concentrent leurs premières colonies de population.
Pendant trois siècles, le rouge-violacé du coeur et le doré de l'aubier font le bonheur des fabricants de teinture. C'est donc par bateaux entiers qu'il traverse l'océan jusqu'au milieu du XIXe siècle et l'apparition de nouveaux pigments.
PLACE NETTE POUR LE BÉTAIL
Comment les frères Tourte ont-ils découvert, vers 1760, son nouveau potentiel ? L'histoire reste mystérieuse. Les magiciens de l'archet repèrent en tout cas ses propriétés physiques : une densité exceptionnelle (jusqu'à 1 150 g, soit près de deux fois celle du chêne), une élasticité rare, une résistance à la courbure et une capacité vibratoire extrêmes. Ils tentent alors d'inverser la courbure de l'archet, non plus vers les crins et le musicien mais vers l'extérieur. Le résultat va bouleverser la scène musicale européenne, en offrant simultanément rapidité aux instrumentistes et puissance au son.
Encore largement disponible, le matériau reste toutefois précieux. Héritier de Tourte, Dominique Peccatte comptait, dans son stock, du bois de pernambouc mais aussi d'autres essences pour les archets de second rang. Aujourd'hui, moins de 10 % des archets fabriqués utilisent cette espèce. En France, environ 2 000 pièces seraient ainsi produites chaque année en pernambouc. A l'échelle mondiale, les producteurs avancent un chiffre annuel de 200 à 300 mètres cubes.
S'il est vrai que les Européens ont longtemps profité d'une réserve qui semblait inépuisable, les Brésiliens ne se sont guère montrés plus regardants. Les arbres ont été abattus pour planter canne à sucre, café, soja ou eucalyptus, quand ce n'était pas pour faire place nette au bétail ou aux bâtisseurs de villes. Les troncs étaient transformés en poteaux télégraphiques, les planches en traverses de chemin de fer ou en planchers. Il n'est pas rare, encore aujourd'hui, de trouver, dans la campagne brésilienne, des palissades en pernambouc. "Il est mal coupé, donc à peu près inexploitable", regrette l'archetier Edwin Clément.
Quel avenir pour le pernambouc ? Ouvert, assurent les Brésiliens, à condition que les archetiers trouvent un substitut. "Sombre, réplique Edwin Clément, surtout si nous trouvons un substitut." Car qui financera alors le programme de conservation ?
Nathaniel Herzberg
Article paru dans l'édition du 02.08.07.
LE MONDE | 01.08.07 | 14h40 • Mis à jour le 01.08.07 | 14h40
Empilées au fond de la grange, entre trois vieux vélos et un aspirateur, quelques dizaines de planches n'attirent pas le regard. Deux bâches en plastique, des pièces de sapin pour fixer l'ensemble... Pour un peu, on mêlerait le tout aux bûches de chauffage, entreposées à côté.
Pourtant, Edwin Clément veille sur ce tas de bois comme sur un tas d'or. "C'est avec ça que je vais finir ma vie professionnelle", sourit-il. Dans la bouche d'un quadragénaire, l'expression a de quoi surprendre. Cet artisan consomme peu de sa réserve - il fabrique moins d'une trentaine d'archets par an, qu'il commence ici, dans cette ferme du Morvan, et qu'il achève dans son atelier parisien -, mais le bois de pernambouc vient de voir son commerce sévèrement restreint par la communauté internationale. Or, depuis deux cent cinquante ans, ce bois est la matière première des archets de haute qualité.
Le 13 juin, la Convention sur le commerce des espèces menacées d'extinction (Cites), réunie en session à La Haye, a classé dans son annexe II Caesalpinia echninata. Entre les éléphants du Botswana et certains coraux, les responsables environnementaux de la planète ont porté leur attention sur cette légumineuse de 10 mètres de hauteur. A l'unanimité, ils ont suivi l'appel à l'aide des biologistes de Rio de Janeiro. Dorénavant, toute transaction devra s'accompagner d'un certificat émis par l'exportateur et d'un autre rédigé par le pays importateur. Manière pour les Brésiliens, seuls producteurs, de fermer les vannes.
Pour eux, en effet, cet arbre fétiche est avant tout une "espèce menacée d'extinction", comme ils l'ont officiellement déclaré dès 1992. Leur position ne manque pas, il est vrai, d'arguments. Provenant d'arbres poussant exclusivement dans la forêt pluviale atlantique du Brésil - Mata atlantica -, le bois de pernambouc n'a cessé de voir ses réserves diminuer. "Il rassemble tous les facteurs de l'espèce en danger", souligne Bernard Riera, spécialiste des forêts tropicales au CNRS.
Il ne pousse que sur les sols sablonneux ou argileux arrosés par la pluie. Sa croissance est particulièrement lente, ce qui ralentit la régénérescence de l'espèce. Surtout, "sa zone d'implantation s'est considérablement érodée", insiste Bernard Riera. C'est en effet sur la côte atlantique que s'est bâti le Brésil. Depuis un siècle, la Mata atlantica n'a cessé de céder du terrain, aux cultivateurs et aux éleveurs, comme aux bâtisseurs de villes. Il reste aujourd'hui moins de 10 % de la forêt d'origine.
Les Brésiliens ont pourtant concentré leurs griefs sur "l'exploitation commerciale" du pernambouc. Avec en ligne de mire, les seuls utilisateurs avérés : les fabricants d'archets. Quatre cents petites entreprises réparties aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne, depuis peu au Brésil ou en Chine. Et d'abord en France.
Car si l'Italie constitue le berceau du violon, la France reste la patrie des archets. L'une entretient la statue d'Antonio Stradivarius. L'autre alimente plus discrètement le culte de François-Xavier Tourte (1748-1835), père de l'archèterie moderne. C'est lui qui à la fin du XVIIIe siècle profita des caractéristiques uniques (densité, robustesse, élasticité) du pernambouc pour inventer l'archet moderne.
Cette découverte a non seulement fait passer la musique classique des salons aux grandes salles de concert, elle a également multiplié les possibilités techniques offertes aux violonistes. "Paganini n'aurait jamais eu un tel succès sans le bois de pernambouc", assure Edwin Clément. Façon de dire qu'un grand violon n'est rien sans son archet.
L'ARBRE QUI SAUVERA LA FORÊT
La flambée des prix des instruments à cordes n'a d'ailleurs pas épargné les archets. Pour acquérir une baguette cambrée de 60 grammes sortie des ateliers Tourte, il faut compter un minimum de 120 000 euros. Un archet neuf réalisé par Edwin Clément, coûtera lui de 2 500 à 4 000 euros. "On me dit que c'est cher, grogne l'artisan. Mais demandez à votre plombier de travailler entre 50 et 60 heures et revenez me voir..."
Ce travail de précision, où interviennent aussi la nacre, l'or ou l'argent, l'ébène, la soie, le cuir et le crin, Edwin Clément l'estime lui aussi "menacé d'extinction". De retour de La Haye, où il a assisté impuissant au "désastre", il dresse à son tour un argumentaire serré. Oui, admet-il, le pernambouc est en danger. "Nous sommes les premiers à l'avoir dit, précise-t-il. Et nous sommes les seuls à avoir mis en place un plan de sauvetage."
Depuis 2000, 80 % des archetiers de la planète versent 2 % de leur chiffre d'affaire au programme de conservation du pernambouc (IPCI), dont Edwin Clément est un des porte-parole. 500 000 arbres plantés en cinq ans, un inventaire lancé, des actions de sensibilisation : "L'an dernier, encore, les Brésiliens nous ont demandé d'accroître notre contribution, poursuit l'archetier. Et là, ils nous font passer pour des pilleurs de forêt..."
Edwin Clément respire. Et reprend. "Mais il y a pire. En réalité, ils se moquent du pernambouc. Nous avons juste servi de monnaie d'échange." Explication : avant le sommet de La Haye, le classement de quatre essences était réclamé. Deux espèces de palissandre, le cèdre rouge et le pernambouc. Les pays d'Amérique latine, qui exploitent les trois premières par dizaines de milliers de mètres cubes, se sont liés pour s'opposer à leur classement. En gage de bonne foi, le Brésil a mis en avant sa demande sur le pernambouc et ses quelques centaines de mètres cubes utilisés chaque année. Les trois autres propositions ont été rejetées. "C'est l'arbre qui cache la forêt", soupire Edwin Clément.
"L'arbre qui sauvera la forêt", rétorque Charlotte Nithart, directrice de campagne à l'association Robin des bois. "Ce type d'espèce à forte valeur ajoutée, qui pousse au milieu des autres, peut éviter des coupes massives. Et puis pour une fois que les Brésiliens demandent l'aide de la communauté internationale, il ne faut pas les décourager." Elle estime la décision équilibrée puisque les produits finis ont été exclus, au dernier moment, du dispositif : les instrumentistes en tournée ne devront donc pas demander d'autorisation de circulation pour leur archet. Plus largement, elle juge la mesure protectrice pour les archetiers. "Rien n'interdit, dans vingt ans, quand les arbres plantés seront arrivés à maturité, de faire sortir le pernambouc de l'annexe..."
Une perspective à laquelle Edwin Clément ne croit guère. Dans son atelier de 8 m2, avec vue sur la vallée, il montre sa boîte de petits rabots, son canif, et son petit tour électrique. "A l'époque de Tourte, il y avait des pédales. Mais le reste n'a pas changé." Il présente les grumes, les planches de pernambouc, fait vibrer les baguettes. "Cela fait deux cent cinquante ans que nous cherchons un substitut. Alors ne racontons pas d'histoire : il n'y en a pas. La fibre de carbone, peut-être. Ça deviendra de la chimie, une activité polluante, on devra traiter les déchets..." Il remet la bâche sur son trésor. "La transmission est une part essentielle du métier, ajoute-t-il. Mais aujourd'hui, est-ce que je peux encore prendre un apprenti ? Moi, j'ai assez de bois pour aller jusqu'à la retraite. Pas lui." Il replace ses lunettes et sourit : "Nous ne voulons pas être les derniers dinosaures."
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Elastique, résistant et deux fois plus dense que le chêne
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Depuis cinq siècles, l'histoire du bois du pernambouc semble épouser celle du Brésil. De la colonisation à l'indépendance, elle témoigne tout à la fois des échanges entre l'Europe et l'Amérique, des évolutions techniques et industrielles mais aussi du recul constant des réserves naturelles.
Peu après l'arrivée de Pedro Cabral sur les côtes du Brésil, en 1500, les Portugais découvrent les propriétés tinctoriales de cet arbre. Disponible en quantité dans la forêt altantique qui court sur près de 3 000 km de côte, il est baptisé Pau Brasil - le "bois du Brésil". Une partie de l'Europe le baptise "pernambouc", du nom de cette région du Nordeste où les Portugais concentrent leurs premières colonies de population.
Pendant trois siècles, le rouge-violacé du coeur et le doré de l'aubier font le bonheur des fabricants de teinture. C'est donc par bateaux entiers qu'il traverse l'océan jusqu'au milieu du XIXe siècle et l'apparition de nouveaux pigments.
PLACE NETTE POUR LE BÉTAIL
Comment les frères Tourte ont-ils découvert, vers 1760, son nouveau potentiel ? L'histoire reste mystérieuse. Les magiciens de l'archet repèrent en tout cas ses propriétés physiques : une densité exceptionnelle (jusqu'à 1 150 g, soit près de deux fois celle du chêne), une élasticité rare, une résistance à la courbure et une capacité vibratoire extrêmes. Ils tentent alors d'inverser la courbure de l'archet, non plus vers les crins et le musicien mais vers l'extérieur. Le résultat va bouleverser la scène musicale européenne, en offrant simultanément rapidité aux instrumentistes et puissance au son.
Encore largement disponible, le matériau reste toutefois précieux. Héritier de Tourte, Dominique Peccatte comptait, dans son stock, du bois de pernambouc mais aussi d'autres essences pour les archets de second rang. Aujourd'hui, moins de 10 % des archets fabriqués utilisent cette espèce. En France, environ 2 000 pièces seraient ainsi produites chaque année en pernambouc. A l'échelle mondiale, les producteurs avancent un chiffre annuel de 200 à 300 mètres cubes.
S'il est vrai que les Européens ont longtemps profité d'une réserve qui semblait inépuisable, les Brésiliens ne se sont guère montrés plus regardants. Les arbres ont été abattus pour planter canne à sucre, café, soja ou eucalyptus, quand ce n'était pas pour faire place nette au bétail ou aux bâtisseurs de villes. Les troncs étaient transformés en poteaux télégraphiques, les planches en traverses de chemin de fer ou en planchers. Il n'est pas rare, encore aujourd'hui, de trouver, dans la campagne brésilienne, des palissades en pernambouc. "Il est mal coupé, donc à peu près inexploitable", regrette l'archetier Edwin Clément.
Quel avenir pour le pernambouc ? Ouvert, assurent les Brésiliens, à condition que les archetiers trouvent un substitut. "Sombre, réplique Edwin Clément, surtout si nous trouvons un substitut." Car qui financera alors le programme de conservation ?
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j'en ai discuté avec un archetier il n'y a pas longtemps et nous en sommes arrivé à la conclusion suivant!IFred a écrit :concrètement ca se traduit par une obligation de déclaration se stock de pernambouc. Des contrôles de l'exactitude de ces déclarations.
et un contrôls stricte des importations. Le but étant de stopper le commerce au noir du bois
le stock de pernanbouc est loin d'etre en danger.et que les meusures prisent le sont dans un intéret économique et spéculateur.en effet quoi de plus efficace pour faire monter un prix que de dire que le produit se rarifie?exemple avec le pétrole.à chaque risque de crise le prix s'envole tout de suite!pour ce qui est du commerce au noir je ne pense pas que ca mettent les pays producteurs au bord de la faillite.
"je suis de plus en plus convaincu que la source profonde de toute grande entreprise doit être la force morale et la bonté"
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tout à fait, mais le messonge n'est pas obligatoire pour agir!!IFred a écrit :on peu aussi comprendre qu'un etat essaie de maitriser la vente de ses ressources naturelles et cherche à lutter contre le marché noir
ps par stock de pernambouc je j'entendais stock chez les archetiers!
pourquoi faire croire aux gens qu'il va y avoir pénurie?d'ailleurs on peut se demander à qui ca va profiter le plus??je ne pense pas que ce soit aux autochtones!!
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pour faire court: c'est juste une question d'argent et pas de ressource de la spéculation.
en lisant l'article du monde sité plus haut on peut lire que le pernambouc est une esssence bien moins menacée que d'autres qui elles ne font pas l'objet de restriction!
en lisant l'article du monde sité plus haut on peut lire que le pernambouc est une esssence bien moins menacée que d'autres qui elles ne font pas l'objet de restriction!
Modifié en dernier par lolec le jeu. août 09, 2007 8:45 am, modifié 1 fois.
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moi je pense, à en lire l'article, qu'ils sont totalement indifférent à ca!car quand on laisse tailler des poteaux tétégraphiques en pernambouc faut pas rigoler après!!
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j'imagine t'es entrain de jouer et soudain cring cring allo c'est riocellosoleil a écrit :Waouh ... tous les archets que l'on peut faire avec un poteau de téléphone ...
On va en piquer un ?
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